Sur l’assurance obligatoire

Tout est une question de ce qu’on appelle l’antisélection. Ce phénomène existe dans de nombreux domaines de l’économie et des finances, mais dans le secteur de l’assurance, il détermine en fait les règles du jeu.

L’essence de l’antisélection est que l’assuré sait_plusieurs_plus sur le risque que sur la compagnie d’assurance. Par exemple. La compagnie d’assurance a décidé de vendre des polices d’assurance contre l’incendie. Elle a examiné le nombre de maisons dans la ville, a regardé le nombre d’incendies par an, a divisé l’un par l’autre, a ajouté le bénéfice et voilà – elle a obtenu le tarif d’assurance.

Les clients ont réfléchi, se sont gratté la tête et sont allés s’assurer. En premier lieu, bien sûr, ceux qui avaient des maisons en bois et des toits de chaume se sont précipités. L’année financière est passée, la compagnie d’assurance a examiné son portefeuille et a constaté qu’il était déficitaire. Ils ont commencé à analyser la situation et ont introduit une différenciation des tarifs. Le matériau de la maison, le matériau du toit, le type de chauffage, la distance au service d’incendie, s’il y a une alarme. Maintenant, pour souscrire une police, il faut remplir un questionnaire très long. Et le prix varie désormais. Autrement dit, les clients ne comprenaient déjà pas pourquoi ils devaient assurer leur maison en briques avec des sprinklers intégrés, et maintenant ils ne comprennent encore moins pourquoi ils paient. Mais malgré tout, certaines personnes sont quand même venues et ont acheté une police.

Une autre année financière s’est écoulée et la compagnie d’assurance a de nouveau calculé ses pertes. Évidemment, les polices seront plutôt achetées par ceux chez qui le risque d’incendie est plus élevé. Tous les facteurs ne peuvent pas être pris en compte dans le questionnaire. Et le client en sait souvent plus sur la probabilité d’un incendie que l’assureur. Que fait alors la compagnie d’assurance ? Elle augmente ses tarifs. Que font les clients ? Les clients honnêtes avec un faible risque souhaitent encore moins s’assurer. Tandis que ceux qui sont sur le point de subir un incendie continuent de s’assurer. Ils se moquent du prix de la police, car l’incendie est inévitable. Bien sûr, c’est exagéré.

Dans l’assurance maladie, c’est la même chose. Les personnes en mauvaise santé vont se précipiter pour s’assurer, la compagnie d’assurance va augmenter les tarifs, éliminant ainsi de plus en plus de clients honnêtes. Au final, l’assurance maladie coûte une fortune, entourée d’une multitude de conditions et d’exclusions, et elle ne se vend pas massivement. Du point de vue de la compagnie d’assurance, si tu achètes une assurance, c’est que tu as l’intention de te soigner. Dans les cas extrêmes, l’assurance coûtera deux fois plus cher que le traitement moyen attendu. Il faut prendre en compte à la fois le risque et le profit.

Que peut-on faire ? Il faut s’assurer que l’assuré, ce gars qui connaît tous ses risques, ne participe pas à la prise de décision en matière d’assurance. Comment y parvenir ? Par tous les moyens de l’assurance collective : les employés d’une entreprise, les titulaires de cartes de crédit, etc. À titre de comparaison, l’assurance maladie lors d’un voyage coûte, au détail, entre 200 et 300 euros par an. La même assurance, vendue dans le cadre d’un « pack » avec une carte de crédit, coûte entre 5 et 20 euros par an. La différence de prix est de 10 à 20 fois ! Et oui, 95 % des assurés paieront « pour ce gars » qui se casse la jambe en skiant.

Maintenant, regardons l’assurance, qui est en quelque sorte nécessaire à tout le monde : l’assurance responsabilité civile du conducteur ou l’assurance maladie. En effet, la survenance de sinistres pour ces assurances est pratiquement garantie pour chacun. Pas cette année, alors l’année prochaine. Et si cette assurance est volontaire, elle coûtera une fortune. Mais si l’on oblige tout le monde à s’assurer, l’accès à une médecine de qualité ne dépendra pas de l’épaisseur du portefeuille. Humanisme, justice, tout ça.

L’État ne sait faire que par la violence. Tout ce que l’État est capable de faire, c’est d’exercer la force. Un État valable crée, par le biais de la violence, des biens publics. Un État corrompu nourrit simplement les forces de l’ordre. Le bien public est un bien dont tout le monde peut bénéficier, mais qui a un coût. Sans violence, on ne peut pas le créer. Il faut_obliger_payer une taxe routière pour que tout le monde puisse circuler sur de bonnes routes. Il faut_obliger_acheter des assurances pour que tout le monde ait la possibilité de se soigner à moindre coût.

La question de savoir pourquoi ce sont soudainement les personnes en bonne santé qui paient pour les malades est plutôt philosophique. Les personnes en bonne santé ont deux options : acheter une assurance dix fois plus chère (en cas d’assurance individuelle) ou payer 20-30% de plus en finançant le traitement d’un toxicomane ou d’une personne obèse. Si l’on met de côté des notions aussi éphémères que la « justice », la deuxième option est plus avantageuse.

À propos de la justice, d’ailleurs. Différentes sociétés perçoivent la justice de manière différente.

Voici, par exemple, un dilemme : il faut donner de l’argent à un nécessiteux, mais alors l’argent ira aussi à celui qui n’en a pas besoin. En Europe, on choisira de « payer le nécessiteux ». Aux États-Unis et en Russie, on optera pour « pas un centime aux escrocs ». Aux États-Unis, on dépensera un million de dollars pour que « la justice triomphe » et que le voleur qui a dérobé un tapis dans une maison étrangère, après un long procès, reçoive « ce qu’il mérite » et purgée plusieurs années de prison, où il sera nourri, habillé et protégé. En Europe, on ne mettra même pas le voleur en prison. Quelle grande honneur. Mais on le surveillera de près en liberté et on dépensera de l’argent (beaucoup moins) pour son aide, sa formation et sa réinsertion. Du point de vue d’un Américain, cela semble être une injustice : il a volé, et en plus il reçoit une aide et une éducation ainsi qu’un coach en développement personnel. Du point de vue d’un Européen, c’est tout le contraire. « Récupérer tout » n’est de toute façon pas possible et se focaliser sur le passé n’a pas de sens. нет. Il faut le faire de manière à ce que cela soit le plus avantageux possible pour la société (peu importe que cela soit également bénéfique pour les voleurs).

C’est pourquoi, d’ailleurs, en Europe, la culture de l’assurance maladie obligatoire est bien développée, tandis qu’aux États-Unis, elle ne pourra jamais s’implanter. Je suis enclin à penser que la société n’est tout simplement pas prête. Les rednecks et les nouveaux riches, qui ne rêvent que d’argent – que peut-on en attendre ?

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