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Il existe un journal appelé «Vecherniy Kiev». Autrefois, sous l’URSS, c’était un quotidien à la fois mondain et soviétique, avec des éditoriaux, des articles intéressants pour les citadins, des prévisions météorologiques et, bien sûr, un programme télévisé. C’est principalement pour le programme télévisé qu’on s’abonnait à ce journal.
La Perestroïka est arrivée, les vents du changement ont soufflé et le Kiev du soir est devenu plus « marchand ». Par exemple, une rubrique d’annonces payantes y est apparue. Dans cette rubrique, il était possible de publier des nécrologies. Une nouveauté à la mode. Sous l’ère soviétique, les nécrologies dans les journaux n’étaient publiées que pour des personnes très importantes, mais ici, il était désormais possible de publier, moyennant finance, un nécrologe pour n’importe qui.
Bien sûr, les nécrologies continuaient à être publiées, mais pas pour tout le monde, seulement pour ceux dont les proches avaient soit de l’argent, soit le besoin de vanité, fondé sur le succès de la vie du défunt. Pratiquement toutes les nécrologies étaient écrites sur le même modèle. Né à telle date, a servi-travaillé, membre du PCUS depuis telle année… — l’adhésion au PCUS comme critère de succès dans la vie avait encore une certaine importance à l’époque.
Et voilà, le printemps, le soleil, bientôt les châtaigniers vont fleurir. Mon camarade de classe Dima Kozyonov est assis avec nous, les autres étudiants, sur le granit des marches de l’entrée de la faculté. Dima étudie attentivement le « Kyiv Evening ». Le vent frais (de changement) ébouriffe ses cheveux, essaie de faire voler les pages du journal. Dima résiste à cela, redresse les pages d’un mouvement caractéristique, puis remarque doucement : « Hmm, il faut le dire, les communistes meurent comme des mouches… »